Saturday, December 04, 2010

61 : O Portugal ère


Bon, on quitte le ria de Portosin avec un vent maigrelet, puisqu'un simple bout de bois arrive à nous dépasser ! Il me faut cajoler le faisceau électrique du démarreur pour que le moteur veuille bien se remettre au travail, ça me rappelle ma moto... Allez, le vent revient dès que l'on rejoint la côte et nous pousse vers le Portugal, enfin presque... Au milieu de la nuit, alors qu'on approche de la frontière, plus rien ! 15 virements de bord et on avance à peine de 2 miles en 3h... Y'aurait pas moyen d'avoir un vent normal ? C'est soit la tempête, soit le calme plat ! On refabrique donc notre vent à nous pour rejoindre le grand port industriel de Leixoes, à quelques encablures de Porto, où l'on pousse un cargo porte-containers pour rejoindre la marina un tantinet délabrée...
Désolé Dédé, on fait quelques infidélités au pineau charentais pour goûter au breuvage local, d'autant qu'on en trouve du bon à des prix tout à fait correct au cours de nos pérégrinations portoesques, loin des caves à touristes... Mais Porto, qui s'étale sur les deux rives abruptes du Douro reliées entre elles par un viaduc Eiffel, vaut bien que l'on s'y attarde et que l'on flâne dans les ruelles populaires, où le linge pend aux fenêtres et où le petit resto de quartier installe son barbecue sur le trottoir...

Enfin, un vent bien établi nous envoie plus au sud, 110 miles en 24h, ça fait tellement de bien d'avancer que l'on zappe quelques escales intermédiaires pour rejoindre Cascais, à 50 kms de Lisbonne, juste après le Cabo da Roca qui est le point le plus occidental de l'Europe continentale...
On s'y arrête quelques temps, Jim doit se faire arracher une dent qu'il s'est cassée en mangeant des huîtres à Vannes... Je lui avait pourtant bien dit qu'il ne fallait pas manger la coquille ! Il m'annonce aussi que comme il n'arrive pas à dormir en mer, il préfère ne pas s'engager pour une transat... C'est sage de sa part, mais c'est vraiment dommage, surtout après tout le boulot qu'il a fait, notamment tout ce qui concerne l'électricité, et ce n'était pas une petite affaire sur un bateau âgé de 35 ans ! Quant à moi, il va falloir que je reconsidère mon plan de route...
En attendant, on part à l'assaut de la forteresse mauresque qui domine la ville historique de Sintra, ancienne capitale du Portugal, et l'on va également traîner nos guêtres dans l'actuelle capitale, Lisbonne, qui accueille le sommet de l'Otan... Ça me donne l'occasion de manifester avec le parti communiste local pour la paix, après tout, quand j'ai acheté « Éclipse », elle s'appelait encore « Affiche Rouge » ! Otan nao, Paz sim !
Mais le tram n°28 continue d'escalader les pentes raides du quartier ancien de l'Alfama, avec quelques ados resquilleurs agrippés au marchepied, frôlant les murs des rues sinueuses et étroites...
Le soir venu, les arènes retentissent des riffs électriques étourdissants du guitariste Joe Satriani, la soirée fado, ce sera pour une autre fois...

Je retourne également voir l'Oceanarium de Lisbonne, construit à l'occasion de l'exposition universelle de 1998, où un immense bassin relie plusieurs biotopes, des eaux froides de l'antarctique aux eaux chaudes des tropiques, montrant ainsi l'interdépendance de tous les milieux marins et que notre planète n'est baignée que par un seul océan...

Océan où l'on s'élance de nouveau, plein vent arrière, toujours vers le sud... Quand patatras, la houle croisée me fait involontairement empanner, un coup de trop pour la bôme qui se casse net en son milieu, le frein de bôme n'a pas suffi à amortir la violence du choc, personne n'est blessé, c'est l'essentiel et il n'y a pas d'autres dommages, notamment pour la voile, retour à Cascais contre le vent et les vagues, le lot de consolation, c'est que l'on pêche un joli petit thon et trois maquereaux et qu'une famille de dauphins vient nous saluer au soleil couchant...

C'est donc du poisson grillé au barbecue que l'on partage avec nos voisins de « Transcendance », un voilier irlandais, eux ils ont cassé leur barre en luttant pendant 5 jours contre des vents de 80 km/h dans le golfe de Gascogne, ils repartent un jour avant nous vers le Maroc puis (peut-être) les Canaries, emmenant avec eux Pappy qui change ainsi de bord... C'est donc à deux que l'on se dirige vers Lagos au sud du Portugal, et sous génois seul, la bôme n'étant pas réparée... Et ben, on n'a jamais aussi bien avancé, 117 miles en 24h, et aussi facilement, le génois encaisse les sautes de vent et les rafales, le speedo accroche les 7 nœuds, ce qui ne doit pas être loin de la vitesse théorique maximum de ma carène, qu'est-ce qu'on s'est fait ch... à prendre des ris dans cette foutue grand'voile qui nous déventait le génois !

Par contre, une fois le Cabo Sao Vicente contourné, on se retrouve vent de face, et là, le génois tout seul, c'est pas glop, comme les voiles latines ou les jonques chinoises soit on tire de longs bords de côté, soit on tire au plus court au vent diesel, en longeant la côte et les falaises déchiquetées de la Ponte da Piedade éclairées par le grand soleil matinal...

Nous voici donc scotchés à Lagos pour quelques temps, on n'y est pas tout seuls, cela fait presque dix jours que Madère ou les Canaries sont hors de portée, quelqu'un a volé l'anticyclone des Açores et les grosses dépressions se succèdent, les avis de mauvais temps sur ces zones défilent sur le Navtex, le Maroc est inondé et l'Europe du nord grelotte, je vois du -7°, du brouillard et de la neige à Lyon ?!! Après tout, Noël ou le nouvel an en Algarve, ce n'est pas si mal...

P.S. : Cherche équipier(e)s pour descendre vers le Sénégal, faire un tour en Méditerranée ou traverser l'Atlantique...

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