Wednesday, June 01, 2011

74 : Me(r)diterranée...

Bon, c'est bien beau de buller, mais si je ne veux pas me faire rattraper par les tarifs de la saison d'été, faut quand même que je voye à voir d'avancer oun poco... Et c'est bien le problème !
Alorsse, pour faire simple, dans cette partie de la Méditerranée, soit il n'y a pas de vent du tout, soit il est très fort et contre toi, bien sûr ! Cela implique, plus fréquemment que souhaité, l'assistance du vent diesel... Qu'est-ce que j'ai bien fait de changer le moulbif d’Éclipse, ça m'a coûté les 2 bras, mais ils sont en train de repousser...
Alors que je franchis le méridien de Greenwich, Éclipse passe à l'est, je crois que je peux baptiser son moteur « Vent d'Orient », comme il est fait sur une base japonaise (une marque aux 3 diamants...), donc dorénavant, vous saurez ce que cela signifie quand souffle le vent d'orient...
Malgré tout, c'est bien dommage d'avoir investi dans un voilier si c'est pour se trainer au moteur !
Un vieux slogan affirmait qu'en France, on n'a pas de pétrole, mais on a des idées... Moi je peux vous dire que quand on a de la pétole, il n'y a pas beaucoup d'idées pour avancer, je comprends pourquoi les romains utilisaient des galères pour maintenir leur emprise sur la Mare Nostrum, parce s'il avait fallu compter sur ce capricieux Éole ! Et puis un moteur qui marche à l'huile de coude, c'est inusable ! Il suffit de remplacer les coudes usés..
J'atteins régulièrement la vitesse décoiffante de 0 nœuds, confirmée par le GPS, ce qui signifie même pas de courant, et si cela me permet de faire quelques bonnes siestes, il faut néanmoins veiller au trafic maritime des ferries, des bateaux de pêche et des navires de commerce, surtout la nuit... La chasse aux ex-cargos et pas-que-beaux est ouverte ! Outre mes feux de nav', pour mieux me signaler, j'éclaire mes voiles avec les lampes solaires, jusqu'ici tout le monde a su m'éviter...
Ce n'est pas l'activité pêche qui occupe mon temps, rien de rien, nuit et jour ! J'aperçois bien de ci, de là quelques requins se dégourdissant les nageoires à la surface, je serais bien em...dé si j'en attrapais un avec ma ligne à bars, non ce n'est pas un fil qui relie les débit de boissons, en l’occurrence je recherche plutôt un débit de poisson !
Je vois aussi quelques rares dauphins, surtout la nuit, ça devient une habitude, comme ça je ne loupe pas les photos (!), comme ces souffles de baleines dans le lointain matin, m'enfin, c'est loin d'être exubérant tout ça...
Faut dire que j'assiste au départ des chalutiers à Rosas à l'aube, façon 24 heures du Mans, tous sur la même ligne avant de mettre les gaz à fond, je doute qu'il reste encore un anchois (la spécialité locale) à la surface après cette razzia...
Bon, je profite d'être entré dans le golfe du roi (fainéant) des animaux, ggrrooaaoorr ! Pour faire un tour (d'où le mot : touriste) à Cadaquès, charmant village perché sur son rocher au fond de son anse (et pas l'inverse !).
Comme disait Salvador Dali, l'un de ses plus illustres habitants, « je suis las du choc fou dans l'vin ! » Du « Vi Negre », bien sûr, pour faire plaisir à mon pote Gus ! Je confirme qu'après une semaine à moto, ce picrate avait effectivement tourné au vinaigre !!!
Ma dernière nav' de la saison vaut son pesant de cacahuit'...
Bon, d'abord il faut virer les caps avant de savoir comment établir durablement ses voiles, parce que ces bouts de cailloux vous changent comme qui rigole un vent du nord en vent d'est ou d'ouest, qui bien sûr ne dure pas...
Allez, la remontée vers la face sud de l'hexagone peut commencer, au près serré, et là c'est le pilote automatique qui fait la gueule, mossieu ne veut pas être secoué, parce que les risées de vent font lofer le bateau (remonter près du lit du vent) alors que la houle générée par le même vent font abattre le bateau (écarter du lit du vent)... Je vais faire simple, en plus c'est la saison, alors imaginez que vous regardez en boucle un match de tennis en accéléré, et suivez la balle de gauche à droite, et ben le bateau fait la même chose sur l'eau ! Pour un cap fixé à 50°, il oscille constamment entre 25 et 70° ! Et ça, le pilote auto ne veux pas le faire, résultat, c'est bibi qui s'y colle, à devoir barrer non stop pendant 26 heures d'affilée, sans dormir ni boire (juste une tasse d'eau) ni manger (à part un paquet de gâteaux), une jambe tient la barre pendant que les deux bras s'occupent de régler le génois... (Quand je suis en solo, je monte la grand'voile au minimum, directement au 3ème ris, ça limite les manœuvres même si je perds un peu en performance...).
Avec la nuit viennent les orages, et ça, c'est pas glop du tout quand on est le seul voilier à la ronde (devinez où la foudre va trouver son arbre !), alors je louvoie entre les grains, comme de toute façon je ne peux pas lâcher la barre, ça tient éveillé, enfin je ne garantis pas que je ne somnolais pas au petit matin, heureusement que Jim n'est plus là avec ses appareils qui enregistraient la trace du bateau toutes les secondes !
Alors, la cerise sur le bateau, c'est quand j'essaye de démarrer le moteur pour finaliser mon approche sur Port Saint Louis du Rhône, dans l'immense golfe de Fos sur Mer, et que celui-ci refuse obstinément de démarrer...
En plus de ça, la tramontane souffle à décorner les taureaux de Camargue, en plein dans le pif (bien sûr!), heureusement que Philippe de Navy Service (chez qui je me rends pour hiverner Eclipse) arrive avec 2 amis et un canot pour me remorquer gracieusement à bon port, ça c'est vraiment tip top la grande classe !
En sortant le bateau de l'eau, je pensais voir pourquoi le moteur calait systématiquement, persuadé de voir l'hélice emberlificotée dans les mailles d'un reste de filet de pêche, ou quelque chose du genre, mais, kris de tabarnak, Monika (sacré nom d'une pipe !), mille milliards de mille sabords, rien de rien ! Keskisépassé ? J'avais plein de gazole dans le réservoir, donc pas de panne sèche, faut que je cherche une autre cause, le mystère s'épaissit, c'est pas précis...
Et dire que je suis remonté jusqu'ici pour que ma famille et les amis puissent admirer une Eclipse...
Parce que jusqu'ici, le plaisir de naviguer en Méd' m'échappe quelque peu ! Je me console en me disant que tous ces vents contraires seront avec moi quand je ferais le chemin inverse, mais c'est même pas sûr !... Si Éole picole, la rose des vents s'affole...
Bon, la lumière du soleil provençal est belle, trop peut-être, il faut absolument que j'installe, en plus de l'échelle de bain, un bimini sur le cockpit du bateau pour m'abriter du cagnard ! Une tonnelle en canisse où l'on puisse boire le pastisse avec Escartefigue et Panisse, sans pour autant se fendre le cœur, peuchère ! J'ai quelques mois devant moi pour peaufiner la préparation du prochain départ...