Tuesday, March 29, 2011

70 : Te amo, Andalucia !

Je ne pouvais décemment pas aborder les côtes de l'Andalousie sans passer quelques temps à revoir ses principaux joyaux, Cordoue, Grenade et Séville...
Toute cette province du sud de la péninsule ibérique est fortement marquée par l'histoire de la domination arabe suivie de la Reconquista et de ce mélange viendra l'âge d'or (littéralement) du royaume d'Espagne avec la découverte et le pillage des Amériques...

A Cordoue, les romains y ont construit un grand pont, ils savaient comment faire, deux mille ans après il surplombe toujours les flots boueux du Rio Guadalquivir... Les romains ont ainsi laissés de superbes traces de leur génie civil un peu partout tout autour de la Méditerranée, et ce sont aussi ces gars du pont qui ont construit le Pont du Gard...

Les arabes y ont érigé l'une de leurs plus importantes mosquées, un véritable prodige d'architecture là aussi avec son immense salle de prière parcourue d'une forêt de piliers graciles supportant des arches et doubles-arches bichromes, d'où il se dégage une ambiance propice à la méditation et à l'exaltation de la beauté (sous-entendu de la toute puissance de Dieu...)

Pour marquer le retour de la chrétienté, les espagnols ont bâti une cathédrale en son centre, avec tout le luxe imaginable, marbre, bois précieux, peintures et sculptures, cependant la majesté de l'ensemble provient toujours de ce qu'il reste de l'ancienne mosquée alentour, le cœur de Cordoba...
Les juifs ont marqué leur empreinte dans la vieille ville qui entoure la « Mezquita », avec son lacis de ruelles et ses hautes maisons s'organisant autour de charmants patios que l'on entrevoit parfois, comme quoi il est arrivé dans le passé que juifs et arabes cohabitent sans se foutre sur la gueule !

On peut trouver mille bonnes raisons de passer quelques temps à Grenade, bien sûr il y a la visite de ses somptueux monuments, mais aussi l'atmosphère de ses vieux quartiers à flanc de colline, la situation au pied de la Sierra Nevada (qui ne porte bien son nom de Montagne Enneigée que les hivers où l'on n'y organise pas de coupe du monde de ski...), la tradition des tapas gratuits dans certains bars avec votre conso (un verre de vin de Montilla, par exemple), et l'ambiance étudiante, ils (elles) sont 70 000 pour une population totale de la ville de 240 000 personnes, ça donne un vrai coup de « Djeun » ! La grenadine est cosmopolite...
 
Avec la visite de l'« Alhambra », la forteresse-palais qui domine la ville et qui jouxte les sublimes jardins du palais du « Generalife », on se retrouve plongé dans les mille et une nuits, on voudrait être Calife à la place du Calife (c'est pas bien, Iznogoud !) pour pouvoir profiter à son aise de tout ce faste, le summum du raffinement, la quintessence de l'art arabe...

Ici les murs, les fenêtres, les plafonds ne sont pas sculptés, ils sont ciselés, les panoramas sur la vieille ville sont sublimes, les fontaines et bassins qui agrémentent les jardins et les patios distillent une harmonie subliminale...
La ville de Grenade est, à mon opinion, l'un des cinq plus beaux endroits de la planète, c'est dire si j'aime !

Le dernier Calife abandonna Granada en 1492, l'année où un certain Christophe Colomb quitta les rives du Guadalquivir à Séville et découvrit un Nouveau Monde (et un peu d'or...). A l'occasion de l'exposition universelle de 1992 (j'y étais le même jour que « Tonton »), qui réveilla Sevilla de sa torpeur andalouse, j'avais déjà visité (entre autres) la monumentale cathédrale et son clocher, ex-minaret, la Giralda, au sommet de laquelle on accède via une rampe, pas un escalier... 
Cette fois, je me régale du somptueux Palais Royal de l'Alcazar et de ses magnifiques jardins, et il fait bien assez chaud pour déguster ensuite un bon Gaspacho, qui, comme son nom l'indique (gaz-pas-chaud), est une soupe froide... Les soirées tapas et flamenco sont plus chaudes !
Bon, la capitale de la province offre des tas de trucs à voir et à faire, je ne peux m'empêcher de tester la croisière sur le fleuve à l'heure de la sieste, déjà dix jours que j'ai laissé mon bateau...

Ah, un petit conseil pour visiter ces 3 villes : oubliez la voiture ! La plupart des ruelles des vieux quartiers sont inaccessibles, il n'y a pas de places de stationnement et des travaux partout ailleurs, bref un véritable cauchemar ! 
Par contre, un véhicule, ou un âne, une bonne paire de grolles et beaucoup de temps s'avèrent indispensables pour rayonner dans la campagne, parmi les villages croquignolets blanchis à la chaux contrastant avec le vert argenté des innombrables oliviers, et pour accéder aux coins de nature encore sauvages... 
Bon, il vaut mieux éviter l'été, si en février-mars il fait déjà 22-25°, en juillet-août, ça grimpe comme qui rigole vers les 40-45° ! C'est trop chaud pour apprécier un bon sherry de Jerez (ça se dit Rhhéress)...

Thursday, March 17, 2011

69 : Chtimagine III en Antarctique

Nous sommes rentrés hier matin de Puerto Williams.
Notre séjour en Antarctique a été plus que réduit, pas au niveau du temps mais au niveau des mouillages....
En effet à notre arrivée à Melchior en Antarctique après trois jours de traversée sans problème nous avons mouillé près d'un bateau suédois.
Un matin venteux, l'ancre a dérapé... Nous nous sommes retrouvés à presque toucher l'autre bateau. Nous avons du réagir rapidement et avons largué les bouts et mis le moteur en route pour remouiller un peu plus loin et se rattacher.... Quelle ne fut pas notre surprise de voir notre ancre prise dans celle du voisin... Nous leur avions pourtant demandé où était leur ancre... Leur indication était fausse...
A force de faire marche avant et marche arrière pour se dégager un bout s'est pris dans l'hélice... Pierrot a du plonger trois fois pour le couper. Il en restait encore deux rondelles que nos amis de Mar y Poles ont dégagés.
Après plusieurs essais convaincants nous sommes partis sur un autre mouillage à Cuverville. C'était un endroit magique.... Nous sommes repartis le lendemain pour un autre mouillage et là par 300 m de fond l'hélice a fait un drôle de bruit alors que nous étions au ralenti et d'un seul coup plus rien... En mettant sa tête sous l'eau Pierre a vu qu'il n'y avait plus d'hélice.... Nous sommes donc rentrés sous voiles sur Melchior et y sommes arrivés le soir.
Les derniers 100 m ont été parcourus en poussant le bateau avec l'annexe avant de remouiller au même endroit... Pour nous l'Antarctique était fini.... Après 3 ans de projet, c'était dur à avaler...
Mais tout n'était pas perdu car nous pensions pouvoir réparer avec l'aide des bateaux de passage qui possédaient une autre hélice. Manque de chance, Pierrot en plongeant s'est aperçu qu'il manquait un bout de l'arbre... Celui ci s'est rompu au niveau de la chaise d'arbre. Nous avons donc attendu une bonne fenêtre météo. Cela nous a pris près de trois semaines dans la "marina Melchior" car nous étions 6 bateaux à attendre pour traverser le Drake...
IMAQA nous a remorqué pour sortir du mouillage et nous avons eu deux calmes de 5 heures environ chacun au sud et au nord du Drake. Un coup de vent soudain et brutal nous a couché... Il a fallu faire vite pour affaler et carguer la GV et rouler le génois. A sec de toile on était à 7 nœuds... au bout de quelques heures nous avons remis la trinquette seule et refait route. Nous n'avons rien cassé et c'est bien ça l'essentiel.
Maintenant à Ushuaia nous espérons réparer rapidement et continuer notre route.
La bise.
Les Chtis.

Wednesday, March 16, 2011

68 : Label de Cadix

J'ai amarré Eclipse à Rota, à l'extrémité nord de la Belle de Cadix... Située sur une presqu'ile sur la façade atlantique de l'Andalousie, la ville de Cadiz héberge l'un des plus renommés carnavals, où le traditionnel défilé de chars sur une large avenue de la ville nouvelle se conjugue avec les troupes de chansonniers itinérantes dans les étroites ruelles de la vieille ville...

Le défilé de chars a lieu le premier dimanche de la dizaine de jours que dure le Carnaval, spectacle haut en couleurs et riche en confettis et serpentins comme tous ce genre de défilé (sans toutefois se comparer à l'extravagance du Carnaval de Rio)...
Vu (ou plutôt entendu) la clameur populaire au passage de l'aigle volant articulé, suivi par ses cracheurs de feu, la Troupe des Machines de l'Ile de Nantes ferait un tabac ici avec son éléphant !  

Jack a dit en Acadie qu'à Cadiz, le carnaval c'est d'abord une fête populaire et familiale, et la population s'y implique grandement, se costumant à tous âges pour aller se régaler des couplets satiriques clamés par les « coros »...
Ce sont des chorales costumées clamant leur répertoire depuis des chariots tirés par des tracteurs si elles sont officielles ou allant à pied d'un porche à un coin de rue si ce ne sont que des « amateurs ».
Quoiqu'il en soit, ce sont de vrais artistes, qui offrent de vraies performances vocales...
Les amateurs de spectacle, c'est à dire le public, répond activement à la pertinence et l'impertinence du propos, qui prend souvent pour sujet les relations de couple mais aussi la vie politique et sociale, pas étonnant que le Carnaval ait été interdit pendant la dictature franquiste !
Une simple perruque fluo ou une paire de lunettes fantaisie suffisent à faire un plus ludique mais il y a énormément de costumes plus élaborés, des enfants déguisés en coccinelle, en arlequin, en Bob l'éponge, en petite fée ou bien sûr en sévillane et des adultes grimés en veuves éplorées, en pirates, en girafe ou en coq, en preux chevaliers, en légume, en super-héros, en diablotins, en hommes préhistoriques, en femmes fatales, etc...
Les avatars virtuels du monde numérique prennent vie dans la rue, que ce soit pour exorciser ses démons ou, plus souvent, juste pour rire... On sent que ça fait du bien de se changer les idées de la grave crise qui frappe de plein fouet l'Espagne dont l'économie repose en grande partie sur le système des crédits multiples...

Tout ça se passe dans les ruelles et les placettes de la vieille ville, il y a une foule énorme et donc une cohue indescriptible, collés-serrés, les cons pressés sont comprimés comme les autres ! Moi qui n'aime pas l'oppression des masses populaires...
Les bouchons de la rue sautent moins facilement que ceux des bouteilles, surtout que l'espagnol est fier, pas question de reculer d'un quelconque côté pour faciliter le passage en sens inverse... Résultat, ça coince ! Hombre !
Heureusement qu'il y a parfois des échappatoires, je m'accorde de temps à autre quelques pauses sur le front de mer, faut dire que suivre le mouvement implique de crapahuter, piétiner, bousculer, bref, ça use ! La météo, orageuse et agitée toute cette semaine, s'avère finalement clémente pour les carnavaliers, ça me permet de tester ma dernière paire de lunettes de soleil, avec laquelle on ne manque pas de me regarder droit dans les yeux...

Bon, en Espagne, on n'est jamais très loin d'un troquet, et encore moins pendant le carnaval où fleurissent les terrasses ou les comptoirs improvisés... On s'y régale notamment de fruits de mer (j'adore les oursins !), de tapas divers, de paella, de bière et de vins régionaux, comme le Sherry de Jerez (rouge liquoreux) ou le Manzanilla de Sanlucar de Barrameda (blanc sec)... On peut bien sûr trouver plus corsé, genre whisky, vodka, etc... mais le costume d'ivre-mort n'est pas celui qui permet le mieux de participer à la fête, non ?

Les horaires du ferry ne me permettent pas de rester à Cadiz la nuit, comme je me suis installé de l'autre côté de la baie, mais le carnaval de Rota, bien que plus modeste, s'avère tout aussi haut en couleurs pour satisfaire le goût de la fiesta des petits et grands enfants et finir d'achever ce qu'il me reste de doigts de pied...
Las, un violent orage prive Rota de la cavalcade finale, un mauvais poisson d'avril mal placé, en quelque sorte, il n'y a pas que l'équipe du XV de France qui prend l'eau ! J'en profite pour fignoler mes photos sur l'ordi, y'a du taf !

Dire que cette semaine, c'est la Saint Patrick, des guirlandes on va passer à l'Irlande, et ce n'est pas une erreur de géographie, ici aussi il arrive souvent que Guy naisse... Puis, dans un autre genre, l'Espagne ne va pas tarder à basculer dans les processions de la semaine sainte, une tradition très suivie partout dans le pays...

Wednesday, March 09, 2011

67 : Je me gave en Algarve...

De mon camp de base à Albufeira, je rayonne dans cette province du sud du Portugal, profitant de la douceur du climat hivernal, comme les cigognes... J'en ai ainsi (heureusement) un autre aperçu que la succession de vastes complexes hôteliers qui bétonnent une (trop) grande partie de la côte pour offrir un paradis standardisé et sans âme à des dizaines de milliers de touristes d'Europe du Nord... Aucun problème pour suivre le championnat de foot anglais, ou ces maudits ennuyeux matches de cricket tout en buvant une pinte de bière, plus de 20 000 anglais se sont installés dans la région et il semble que chacun ait ouvert un pub ! Moi, je me contente d'y aller regarder les premiers matches du tournoi des 6 nations (c'est du rugby, pour les ignares !)...

Il suffit de s'enfoncer d'une dizaine de kilomètres dans l'arrière-pays pour retrouver le Portugal aux portugais, où la vie des villages est rythmée par les marchés hebdomadaires, comme à Loulé, où je fais amples provisions de légumes et fruits frais, c'est la saison des petites oranges juteuses sucrées à souhait... J'en ramène aussi du miel, du piment pour faire le Piri-Piri, des olives et du fromage de brebis frais, qui s'accommoderont très bien d'un vin de l'Alentejo, on trouve de bons vins très bon marché par ici...

Il y a aussi les fêtes religieuses où l'on promène le Saint Patron en procession à travers le village, et où les villageois font des offrandes à leur église... A Querença, tout le monde élève des cochons et le curé se retrouvait chaque année avec une énorme montagne de saucisses, boudins frais et saucissons dont il ne savait que faire... Il a donc eu l'idée d'organiser un festival de la saucisse conjointement à la fête paroissiale, qui a un grand succès dans les environs, et la vente de toute la cochonnaille remplit amplement les caisses et les ventres affamés... Amen ! (A moins que ce ne soit « amène » ?)

L'Histoire laisse aussi son empreinte dans cette partie du Portugal, avec ses villes fortifiées, Silves et sa citadelle imposante qui domine un pont romain, mais aussi Lagos où l'on trouve le premier marché aux esclaves, érigé dès les premières expéditions portugaises le long des côtes d'Afrique... Plus exposées, les fortifications de Sagres ont été ravagées par le tsunami consécutif à l'énorme tremblement de terre qui rasa Lisbonne en 1755... Il reste néanmoins les belles falaises du Cabo Saô Vicente, tombant abruptement dans l'océan, comme les Cliffs of Mohair, en Irlande...
Ce sont aussi les terrasses centenaires qui escaladent la Sierra de Monchique pour faire pousser les oliviers, les eucalyptus et les chênes-liège, sous la surveillance du radar de l'Otan installé à son sommet...

Plus à l'est on trouve les rivières de Faro et d'Olhao qui se rejoignent pour former une lagune, paradis des oiseaux (les poissons ont sûrement un avis différent !), dont la vie est rythmée par les marées qui dévoilent ou recouvrent le relief mouvant... Entrer ou sortir du chenal en dehors de l'étale de la marée haute doit être une opération mouvementée, compte tenu des forts courants... J'aurais aimé avoir plus d'expérience (et/ou un équipage) pour prendre quelques mouillages forains dans le courant de la rivière, mais je ne prends pas le risque de jeter Eclipse sur un banc de sable... Las, après m'être amarré à quai à Olhao, je m'entends dire par les autorités portuaires que je dois repartir, faute de place disponible (!)... Heureusement, le gardien de la marina est plus intelligent (et plus aimable aussi) et me laisse stationner sur ma non-place pour la nuit, c'est tout de même rageant car la ville s'avère bien sympatoche, à l'écart du flux touristique, si j'avais su, je serais arrivé un vendredi soir pour pouvoir rester tout un week-end, hors des horaires de travail de fonctionnaires bornés...